Pourtant, cette fois, les appels à l’unité n’ont pas suffi à limiter les tensions au sein de la société française. En démocratie, le débat est souhaitable après de tels événements. Mais depuis la tragédie du 16 octobre, certains, parfois même au sein du gouvernement, se sont engagés sur la voie des anathèmes et des accusations délirantes. Ils prennent la lourde responsabilité d’affaiblir le pays face aux terroristes en dressant les Français les uns contre les autres. Les assassins et ceux qui les ont encouragés auraient-ils déjà gagné ?
Il est urgent de nous mobiliser ensemble autour des principes laïques et républicains. Si nous échouons, l’islamisme radical aura remporté, avec l’extrême droite, une victoire décisive en faisant de la question religieuse, et plus précisément de l’islam, le pivot de la politique française, au détriment des urgences sociales, écologiques et démocratiques. Pire, il aura installé des germes durables de guerre civile.
Pour avancer, il importe d’abord de reconnaître les manquements du passé. Combien d’atteintes à la laïcité et à la liberté d’expression et d’enseignement restées sans réponse ? Combien d’appels au secours ignorés, qu’ils viennent d’enseignants et d’autres agents des services publics devant la dégradation de leurs conditions de travail, ou d’habitants des quartiers populaires devant l’absence de l’État, notamment sur le terrain de la sécurité ? Combien de discriminations à l’égard de musulmans ou de ceux qui sont supposés l’être, laissées impunies ?
Une insuffisance de moyens
Manifestement, le gouvernement considère que l’on pourrait lutter efficacement contre l’islamisme radical sans combattre en même temps, à la racine, le racisme, les discriminations et les déchirures sociales et urbaines des territoires abandonnés. Il feint également d’ignorer qu’existent au sein de l’islam, en France et ailleurs, des forces prêtes à combattre les influences mortifères. Cette absence de vision globale donne toujours une victoire symbolique aux islamistes radicaux. Elle a depuis longtemps favorisé leur implantation.
Oui, les manifestations agressives d’une idéologie totalitaire allant jusqu’au terrorisme doivent être combattues sans trêve ni repos dans le cadre de l’Etat de droit. Pour cela, de nombreux leviers juridiques existent déjà. Il faut résister à la tentation de réagir à chaque attentat par une loi supplémentaire ou des gesticulations spectaculaires. Les carences relèvent surtout d’une insuffisance de moyens de renseignement et de coordination, notamment dans le suivi des réseaux sociaux.
Le combat contre l’islamisme radical, les pressions qu’il exerce à l’école et ailleurs pour restreindre les libertés, notamment celles des femmes ou des personnes LGBTI +, appelle des actions construites, déterminées et proportionnées. Ces politiques doivent être conduites dans la durée et mises en œuvre sans faiblir dans un cadre légal défini et protecteur des libertés. Pour être efficace, il nous faut combattre l’intégrisme islamiste en priorité sur le terrain éducatif, social et politique. Là où les fondamentalismes tentent de faire primer le dogme religieux sur les lois de la République, la fermeté de l’action publique est indispensable.
L’école doit être aux avant-postes de ce combat. Mais elle ne peut pas être laissée seule. Celles et ceux qui y enseignent doivent être reconnus, soutenus et protégés au quotidien, et pas seulement passagèrement au lendemain des drames, particulièrement par un accompagnement humain en cas de difficultés, des outils et une formation pédagogiques renforcés pour permettre à tous les acteurs de l’école de savoir réagir.
Assauts répétés des obscurantismes
La laïcité définie par la loi de 1905 n’est pas une option : elle est et doit rester la loi de la République. Elle a traversé le XXe siècle, faisons-la vivre en garantissant effectivement la liberté de croire, notamment pour les musulmans, ou de ne pas croire. Plus qu’à la multiplication de lois nouvelles, veillons à l’application effective de celles qui existent déjà.
La République, promesse inachevée, doit repenser sa présence dans tous les territoires pour faire exister l’égalité réelle par des politiques publiques offensives, avec des moyens humains et financiers substantiels, notamment dans le cadre de la mise en œuvre d’une transition écologique juste. Elle doit, conformément à sa devise, garantir l’absence de toute discrimination et chercher à réduire toutes les inégalités dans un esprit de fraternité.
Pour nous, il n’y a pas de fatalité à ce que la France tombe dans le piège tendu par les terroristes. Nous ne cesserons jamais de vouloir tisser des liens entre tous les humains, malgré les assauts répétés des obscurantismes. Nous continuerons de lutter partout et toujours contre toutes les formes de racisme, d’antisémitisme et d’intolérance.
Nous avons parfaitement conscience qu’il existe des désaccords entre nous sur ces sujets et que beaucoup reste à faire pour consolider ces réponses : ce texte se veut d’abord un appel à la gauche, aux écologistes et, au-delà, à tous les républicains, à engager ensemble ce travail à un moment où l’essentiel est en danger.
Le piège terroriste
Ce n’est pas une découverte. Depuis plus de 5 ans, les terroristes islamistes ont fait de la France la cible privilégiée de leurs tueries et ils ont démontré, dans ce sinistre « djihad », un redoutable sens du symbole. Janvier 2015, les dessinateurs et journalistes de Charlie Hebdo, en même temps que les juifs de l’Hyper Cacher à Paris. Novembre 2015, les spectateurs et flâneurs du Stade de France, du Bataclan et des terrasses de cafés parisiens. Juin 2016, les deux fonctionnaires de police exécutés à Magnanville. 14 juillet 2016, la promenade des Anglais, à Nice, dévastée le soir de la fête nationale. Juillet 2016 encore, le père Jacques Hamel, assassiné dans son église de Saint-Etienne-du-Rouvray. Sans compter les tentatives contre des militaires qui ont échoué au Musée du Louvre et à l’aéroport d’Orly en février et en mars.
L’attaque menée à Paris, dans la soirée du 20 avril 2017, le démontre à nouveau. En quelques secondes, ce sont trois symboles qui ont été visés. Les victimes d’abord : des policiers, chargés de la sécurité des Parisiens, tué pour l’un et grièvement blessé pour l’autre. Le lieu, ensuite, qui assure à cet attentat un écho planétaire : les Champs-Elysées, cette avenue mondialement connue et parcourue chaque année par des millions de touristes. Le tueur était assuré de rappeler aux Français la menace désormais permanente qui pèse sur eux et de dramatiser le climat.
Trois réponses s’imposent
Le président de la République l’a rappelé peu après ce nouvel attentat. Face à cette violence obsessionnelle, trois réponses s’imposent : la solidarité sans faille à l’égard des forces de sécurité, qui ont la mission de protéger, en première ligne, les citoyens et les institutions ; la cohésion sans faille de la nation face à des tueurs qui cherchent, à tout prix, à l’affoler, la diviser, la fracturer ; la détermination sans faille de l’Etat et de tous les services qui y concourent à traquer, combattre et neutraliser ceux qui sont engagés dans une guerre sans merci contre notre pays.
La France et les Français ne doivent pas tomber dans le piège qui leur est tendu par les tueurs commandités ou franchisés par l’organisation Etat islamique. Ils ne doivent ni basculer dans la panique ni s’en remettre à ceux – la présidente et candidate du Front national en tête – qui veulent appliquer aux djihadistes, réels ou supposés, la loi du Talion que ceux-ci entendent exercer contre la France en général et contre ses forces de sécurité en particulier.
Le risque zéro n’existe pas
La protection des citoyens est un impératif catégorique. Personne ne l’ignore. Chacun, pour peu qu’il soit de bonne foi, reconnaît que les moyens et les résultats de la lutte antiterroriste sont, désormais, au premier rang des priorités et des efforts des pouvoirs publics. Après bien d’autres, l’attentat déjoué à Marseille il y a trois jours seulement l’a de nouveau démontré. Mais chacun sait également que, face à cette menace diffuse et acharnée, le risque zéro n’existe pas.
Ce n’est pas une raison pour oublier que la France est un Etat de droit et que le plus sûr moyen de le défendre est d’en respecter, autant que d’en faire respecter, les valeurs et les règles. L’on veut croire que les Français ne céderont pas, au moment de choisir leur prochain président, aux apprentis sorciers qui voudraient s’en affranchir.
Source : Le Monde (2 articles fusionnés en 1 billet)
FLASH - Selon Zemmour et Onfray, les écolos et toute la gauche sont des partis pro-islamiques
«Vert de l'islam» : Cormand (EE-LV) indigné par Zemmour et Onfray
« Chez Pol ». Vous êtes bien réveillés ? Les citations qui suivent ont réellement été prononcées par leurs auteurs, après le succès des écolos aux municipales dimanche, tous deux sur CNEWS. Michel Onfray : « Les Verts sont plutôt sympathisants de l'anti-sionisme, à l'endroit de l'islamo-gauchisme, plutôt communautaristes. […] C'est une gauche qui n'aime pas beaucoup la République. » Eric Zemmour : «Le vert des Verts correspond comme par hasard au vert de l'islam. Il y a une alliance composite de tous ces gens derrière le vote Vert.» Réaction mi-amusée, mi-catastrophée de David Cormand, eurodéputé et ancien patron d'EE-LV, sur Twitter : « Ces gens sont en roue libre. Ils ont une fonction algorithmique dans leurs cerveaux avec des mots-clefs à base de 'slam', 'communautarisme' et autres mots en 'isme' qui compose au hasard des phrases se parant de l'apparence d'une analyse. » Son successeur à la tête du parti écolo Julien Bayou a, lui, relayé ce message : « Comment peut-on laisser prospérer sur une chaîne de télévision un tel discours ? À quoi sert le CSA ? »
Aucun commentaire :
Enregistrer un commentaire