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25 mai 2019

Putains de camions - Les dégâts du transport routier et le ferroutage, c'est une option ?

En Europe, 80 % des marchandises sont transportées par voie routière. Mais à quel prix ? Enquête sur la folie des poids lourds.

Cela n’aura pas échappé aux automobilistes : les autoroutes européennes sont encombrées par des files de poids lourds toujours plus interminables. Alors que près de 80 % des marchandises transitent par voie routière, le nombre de camions en circulation devrait augmenter de 40 % dans cinq ans. Pourquoi ce choix de la route au détriment du rail ou du transport maritime, qui présentent pourtant de nombreux avantages, notamment écologiques ? Pour quelle raison les camions sont-ils aussi nombreux – un tiers d’entre eux, selon les estimations – à rouler à vide ? Diesel bon marché, chauffeurs payés au lance-pierres, explosion des commandes sur Internet, production et livraison à flux tendu : cette folie des poids lourds, qui résulte d’une série de décisions politiques, notamment un investissement massif dans les autoroutes, sert des intérêts économiques. Si les entreprises privées profitent de ce système, les citoyens en subissent les conséquences : embouteillages monstres, forte pollution, accidents spectaculaires, risques sanitaires et usure précoce des infrastructures publiques. À l’échelle du continent, la Suisse offre pourtant un modèle plus vertueux : le pays a su s’affranchir du lobby automobile pour miser sur le transport ferroviaire.


Raymond Caillaud, de Bressuire (Deux-Sèvres), a été sidéré par un reportage sur la flotte de camions qui sillonnent les autoroutes françaises. « Prenant régulièrement l’autoroute entre Nantes et Bordeaux, je ne vois pratiquement plus de camions français, mais, des chauffeurs lituaniens, polonais, tchèques, etc., qui passent leurs week-ends dans leurs cabines, en touchant la moitié du salaire des conducteurs français ! Je les plains ! J’oublie de dire qu’ils font le plein du camion à Sarrebrück, avec des réservoirs supplémentaires, afin d’atteindre Irun ! Résultat, pas un centime pour les taxes françaises ! »

La volonté politique a laissé les améliorations d’infrastructures régionales au stade de belles intentions écologistes. « Sous la présidence de François Mitterrand, une ministre, originaire de Franche-Comté, a fait mettre au panier, afin de préserver l’environnement de sa région, le canal à grand calibre Rhin-Rhône. Depuis, de Strasbourg (ou Francfort), à Marseille, passent 3.000 camions par jour, dont l’on aurait pu éviter les consommations de gas-oil ! »

Clients et patrons trop exigeants !!

Il pourrait être fait des économies sur les voyages des semi-remorques. « J’ai été, de 1991 à 2000, responsable des approvisionnements de trois très importantes plateformes de la grande distribution. Un an après mon arrivée, je me suis posé la question de savoir pourquoi nous affrétions des camions pour livrer et qu’ils revenaient, à vide. Nous avons contacté tous nos fournisseurs, afin de savoir s’ils seraient intéressés afin que nous organisions un enlèvement chez eux, plutôt que de les charger et de trouver des camions pour nous livrer. Nous y avons énormément gagné, nos fournisseurs et nos transporteurs aussi ! Je n’avais rien inventé… Un concurrent national (Intermarché) le faisait déjà ».

Néanmoins, le ferroutage n’a pas vraiment décollé ! « En 1980, 90 % du fret de brasserie et eaux minérales était réalisé par le rail. Dix ans après, pour 80 %, nous étions repassés, malgré des coûts bien plus élevés, par route (y compris pour des transports Strasbourg-Toulouse). En 1990, notre entrepôt recevait, chaque semaine minimum, un train de 22 wagons de 60 palettes de la Brasserie strasbourgeoise. En 2001, tout venait par camion ! »


C’est le marché des grandes surfaces, notamment, qui dicte les délais et induit les conditions de transport. Sans organisation efficiente, les plateformes multimodales ne s’imposent pas. Le Grenelle de l’environnement prévoyait d’augmenter la part du fret ferroviaire de 14 à 22 %…

  • FLASH 2 - Fermeture imminente de la ligne ferroviaire Perpignan-Rungis, le train des primeurs va bientôt s'arrêter pour laisser place aux camions.

Si cette ligne ferme, le nombre de camions va augmenter de façon significative (20 à 25000 véhicules de +) qui va favoriser : bouchons, pollution, accidents, usure rapide des routes,.... Selon RT, la ligne fermera malgré les promesses du gouvernement et une pétition circule pour le sauvetage de la ligne des primeurs