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11 décembre 2019

Mal logement, un fléau français qui concerne plusieurs millions de personnes

Dormir sous un toit, dans des conditions qui respectent la dignité humaine : un droit inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’homme. Pourtant en France près de 4 millions de personnes sont victimes du mal-logement et plus de 12 millions sont en situation de fragilité par rapport à leur habitation. Stéphanie et Christophe, la quarantaine, habitent dans un camping-car, avec leur fille de 9 ans, Jade, en quête permanente de travail pour survivre. Ces anciens patrons ont dégringolé l’échelle sociale quand leur entreprise de bois de chauffage a fait faillite. La famille perd tout en quelques semaines : travail, biens matériels, et leur jolie maison avec piscine. Le couple enchaîne désormais les missions d’intérim ou s’improvisent ouvriers agricoles.

Stéphanie et Christophe doivent trouver des solutions au quotidien pour que la scolarité et la vie de Jade soit le moins impactées possible. Ces nomades d’un nouveau genre sont de plus en plus nombreux dans notre pays, touché par le mal-logement et la précarité. Comme cette famille, 8,8 millions de Français vivent avec moins de 1000 euros par mois. Une cave insalubre et dangereuse en banlieue parisienne, louée au prix fort par des marchands de sommeil : c’est la seule solution que Dominique, père célibataire, a trouvé afin de mettre ses 2 enfants de 9 et 11 ans à l’abri. Ici, tout n’est que bricolage, rafistolage, et malfaçons. En France, il y aurait plus de 500 000 taudis en location. Depuis 6 mois, la cave a été déclarée insalubre. De quoi accéder en principe à un logement social. Le père de famille appelle inlassablement mairie, préfecture, et bailleurs sociaux. Mais chaque tentative se transforme en cauchemar administratif ! Comme Dominique, près de 2 millions de familles patientent pour obtenir un logement social.

En région parisienne, le temps d’attente est de 7 ans en moyenne. Alors Dominique a décidé de faire un coup de force devant sa préfecture pour tenter d’obtenir enfin une habitation décente. Une voiture comme dernier rempart avant la rue. Christophe, 34 ans, travaille la journée, mais depuis 3 ans il passe toutes ses nuits sur la banquette arrière de sa Renault 25 d’un autre âge. Un pare-brise et de la tôle en guise de garde-manger, de dressing et d’abri. Le trentenaire ne dors que d’un œil, toujours sur ses gardes. Entre son CDI de chauffeur poids lourd et la naissance de sa fille, la trentaine s’annonçait prometteuse pour Christophe. Mais la descente aux enfers a été foudroyante. Et au fil des mois, le temporaire est devenu permanent. Comme un quart des sans domicile fixe en France, Christophe n’a jamais cessé de travailler. Grâce à des petits boulots, il gagne autour de 900 euros par mois. Un budget rapidement grignoté par le quotidien. Assurances, essence, réparation de la voiture… et nourriture. 

Les 10 derniers jours du mois sont les plus difficiles : avec seulement quelques euros sur son compte, Dominique ne mangera pas tous les jours. En France 1 million de personnes vivent sous le seuil de pauvreté, alors qu’ils ont un emploi. Dans cette France affaiblie, de nouvelles formes de solidarité émergent. David le propriétaire d’un terrain agricole près d’Avignon a transformé son champ en refuge pour les victimes de la crise. Les Grandes Terres sont un lieu unique en France. L’association créée par David accueille des familles, les plus fragiles face à la perte de leur logement, contre un petit loyer de 200 euros par mois. David ne tire aucun bénéfice financier de son projet. S’il s’est lancé dans cette aventure, c’est parce qu’il a lui même connu la peur de la rue. Après 20 ans dans le BTP, sa petite entreprise n’a pas résisté à la dernière crise économique. 

Aux Grandes Terres le mot d’ordre est solidarité : pour la douzaine de familles installées ici c’est une façon de rebondir après des années de galère. Mais cette situation est précaire. Car il est illégal de vivre sur un terrain agricole. La mairie a dressé plusieurs PV contre l’association, transmis au procureur de la République. David et toutes les familles risquent l’expulsion. Pendant 9 mois, nous avons suivi le quotidien de ces familles happées par la spirale de la précarité et du mal-logement. Leurs angoisses, leurs défis. Leur combat pour garder leur dignité et tenter de remonter la pente.

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